Dr OUMOU DOSSO : « Je n’imagine pas autrement la femme, que travailleuse et jalouse de son indépendance »

Grâce à sa belle plume et à son travail, elle est passée d’enseignante de lycée à journaliste, puis à Chercheur, sans omettre les différents postes de responsabilités qu’elle a assurés. Docteur Oumou Dosso, à la tête du Women in Media Network (WIMN-CI) œuvre à son niveau, pour la promotion du leadership féminin afin de bannir les stéréotypes et montrer un autre visage de la femme dans les médias. En grande féministe, Dr Oumou Dosso confie qu’elle ne saurait imaginer la femme « autrement que battante, travailleuse et jalouse de son indépendance ». Rencontre avec cette femme dynamique, bosseuse et engagée qui impose le respect.

ENSEIGNANTE DE FORMATION, COMMENT ÊTES-VOUS ARRIVÉE AU JOURNALISME ?

Je suis arrivée au journalisme, disons de façon plutôt fortuite. C’est Venance Konan, qui, quand il a créé son site ” La force de la plume” lors de la crise dite postélectorale dans notre pays a fait un appel à contributions. J’y ai répondu, et avec de belles plumes comme celle du gouverneur Vincent Toh Bi, Macaire Dagry, Alexis Dieth, Samaké Famahan, etc., nous l’avons animé. Puis, quand Venance a été nommé Directeur général de Fraternité Matin, il a fait la proposition au groupe d’écrire des chroniques pour son journal. Ensuite, j’ai eu un grand maître, le journaliste émérite Justin Vieyra. Il m’a appris le métier et ses critiques souvent au vitriol m’ont permis d’être plus disciplinée dans l’écriture et de faire l’économie des fioritures. Puis encore, j’ai été au Centre de formation et de perfectionnement des journalistes à Paris et visité certaines rédactions françaises dont Le Monde.

LE JOURNALISME, ON LE SAIT, EST UN MÉTIER EN PARTIE DOMINÉ PAR LES HOMMES… AU PRIX DE COMBIEN DE SACRIFICES ÊTES-VOUS ARRIVÉE À VOUS FAIRE UN NOM DANS CE DOMAINE ?

 J Oh, je ne crois pas vraiment m’y être fait un nom. Disons que j’essaie d’écrire juste et bien. Cela dit, je pense que de plus en plus les femmes entrent dans le métier et s’en sortent plutôt bien.

DANS VOS ACTIONS, VOUS MILITEZ EN FAVEUR DU GENRE, POURQUOI UN TEL COMBAT ?

Je me suis toujours définie comme une féministe, et j’ajouterais prosélyte. Quand on sait les haies vivaces et géantes que les femmes doivent franchir pour avoir une petite place dans la société, comment ne pas être féministe ? C’est-à-dire comment ne pas promouvoir l’égalité des droits et le bien-être de la moitié du ciel comme dirait le poète ? Je crois également qu’ayant vu ma mère se battre au quotidien pour assurer mon éducation, je n’imagine pas autrement la femme, c’est-à-dire battante, travailleuse et jalouse de son indépendance.

D’OÙ EST PARTIE L’IDÉE DE LA CRÉATION DU WIMN ?

Les Women in Media Network (WIMN) ou encore le réseau des femmes journalistes dans les médias ne sont pas mon idée et encore moins ma création. C’est une grande dame, une brillante militante pour la cause des femmes et des enfants, Mme Graça Machel qui en est la fondatrice à travers la Graça Machel Trust. Mama Graça a estimé que malgré tous les progrès réalisés par les femmes, dans les médias, quand on parle de nous, c’est souvent pour des  faits divers, des scandales, ou des concours d’exhibition. Alors qui mieux que la femme elle-même peut parler d’elle ? Voilà comment est partie l’idée, puis la constitution effective des #GMT-WIMN. J’y ai été cooptée et à mon tour, j’ai installé une section ivoirienne qui regroupe des femmes merveilleuses et de très bonnes journalistes et communicantes.

EN QUOI CONSISTE CETTE ASSOCIATION ? (SES ACTIVITES, SES OBJECTIFS…)

S L’objectif principal des WIMN-CI est de donner la visibilité aux femmes et aux jeunes. Mettre en lumière celles qui excellent dans leurs domaines de compétences, les modèles, mais aussi mettre à l’index des drames comme les grossesses précoces et non désirées dans nos lycées et collèges, l’excision, les violences liées au genre, etc.
Les WIMN-CI ont fait, l’année dernière, un reportage groupé sur le fléau des grossesses précoces et non désirées au lycée de Sikensi. Puis, nous avons fait du loobying afin de permettre la réinsertion et la prise en charge de celles qui étaient sorties du cursus scolaire.
Ensuite, les WIMN-CI ont reçu, grâce au Prof. Valy Sidibé, une formation en anglais à l’École normale supérieure.
Nous travaillons actuellement sur la recherche de fonds pour sauver Othinel, un brave garçon cloué au lit en Tunisie.
Nos actions sont diverses. On me dit quelquefois qu’on ne nous voit pas sur la place publique. C’est à dessein, car ce n’est pas nous qu’on doit voir, mais plutôt ce que nous mettons en lumière. C’est cela l’esprit des WIMN-CI.

VOUS ÊTES VISIBLEMENT UNE FEMME ACTIVE, VOUS AVEZ BEAUCOUP DE RESPONSABILITÉS ET ENDOSSEZ DE NOMBREUSES CASQUETTES, COMMENT SE GÈRE UNE TELLE CARRIÈRE ?

De nombreuses casquettes ? C’est trop d’honneur de voir les choses ainsi. Je suis juste enseignant-chercheur et journaliste. Je suis actuellement en charge de la communication et des relations publiques au ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique. Je ” pige” de temps à temps. Ces activités peuvent être mises sous le même chapitre: donner et recevoir.

LORSQUE QUE VOUS JETEZ UN REGARD SUR LA JEUNESSE IVOIRIENNE AUJOURD’HUI PRINCIPALEMENT LES JEUNES FEMMES, QUELS MOTS VOUS VIENNENT À L’ESPRIT ?

Notre jeunesse, tout comme nous-mêmes, ne va pas bien. C’est certes sévère de présenter les choses ainsi car, fort heureusement, il y a encore quelques hirondelles qui font notre printemps, mais il faut relever que les fondements de notre société ont été sérieusement ébranlés. Cependant ne désespérons pas !

QU’AVEZ-VOUS À DIRE À CETTE JEUNESSE ?

Je dirais à notre jeunesse que rien n’est perdu et qu’elle peut faire mieux que les générations passées. Vous savez, au point où nous en sommes aujourd’hui, avec les positions des chefs des chapelles politiques et la morosité ambiante, on peut comprendre que le moral ne soit pas au beau fixe, mais il y a des raisons d’y croire. La Côte d’Ivoire est un pays formidable…

AUJOURD’HUI, L’HEURE EST À L’ENTREPRENEURIAT …LA PROMOTION N’EN MANQUE PAS ? QUE PENSEZ-VOUS DE L’ENTREPRENEURIAT FÉMININ EN CI ?

L’entrepreneuriat féminin dans notre pays bouge. La difficulté pour ces braves dames c’est qu’elles sont nombreuses à exercer dans l’informel sans grand soutien des structures bancaires. Cependant, quand on voit ce qu’elles font dans l’agroalimentaire, on ne peut que préjuger positivement de ce qu’elles auraient pu faire si elles avaient plus de soutiens. Les femmes entrepreneurs sont à féliciter.

SI VOUS DEVIEZ PROPOSEZ UN COCKTAIL DE RÉUSSITE AUX FEMMES, DE QUOI SERAIT-IL COMPOSÉ ?

Dans la carafe, je mettrai : une bonne poignée de travail, quatre cuillerées de persévérance, une dose d’audace, et je demanderai au bon Dieu de saupoudrer le tout de sa baraka.

EN TANT QUE FÉLINE, VOUS ÊTES : UNE PANTHÈRE, UNE LIONNE, UNE JAGUAR, UNE TIGRESSE… ? 

Je dirai Lionne.

POURQUOI ? 

La lionne est en réalité celle qui règne sur la forêt car sans elle le roi à la grosse tête ne mangerait pas. J’aime l’altruisme et la combativité de la lionne.

Marina KONAN