La vie n’a pas été tendre avec Lionel, qui à la mort de ses parents s’est retrouvé chez son oncle Grégoire. Grégoire était cadre dans une banque, donc régulièrement absent, Lionel devait donc subir les humeurs de la femme de celui-ci, Célestine. Célestine était une très belle femme au teint d’ébène, un large sourire qu’elle affichait à qui voulait le voir dehors. Mais, à la maison, elle était une vraie sorcière.
En effet, depuis l’arrivée de Lionel, elle avait fait partie la servante, et ce rôle, c’était le jeune homme qui devait l’assurer. Debout, à 4h du matin, c’était seulement à 23h qu’il pouvait reposer son corps endolorit et fatigué sur le bout de tissu effiloché qui lui servait de matelas. A peine, les yeux fermés, que Lionel reçut un coup de pagne sur le dos, il en était habitué, ses réveils variaient selon les humeurs de sa tutrice à son réveil. Quand elle était d’humeur, c’était le morceau de pagne et dans le cas échéant, c’était soit un seau d’eau soit un coup balai. Ce jour-là, il avait eu droit au coup de pagne.
Le jeune homme, sans mot dire, se leva et vaqua à ses occupations, il prit une douche et aux environs de 5h du matin, s’en alla à l’arrêt de bus. Lorsqu’il arrivait tôt à l’université. Il profitait pour dormir un peu et étudier. Malgré, tout ce qu’il subissait, Lionel était reconnaissant à son oncle et à sa femme de l’avoir accepté chez lui à la mort de ses parents. Car, aucun autre membre de sa famille ne voulait l’accueillir, chacun avançait des raisons, aussi farfelues, les unes que les autres. Pour payer ses cours, Lionel donnait des cours à domicile et comme il était brillant et studieux, il offrait ses services à d’autres étudiants moyennant quelques sous. Les soirs, il retournait à la maison s’occuper des tâches ménagères. Lionel n’avait droit au repas de la maison, les fois où son oncle était présent et comme ce n’était pas toujours le cas, il lui arrivait de dormir le ventre creux et gargouillant.
Son oncle savait bien comment son neveu était traité, mais il fermait les yeux, c’était le prix à payer pour que Lionel reste toujours sous son toit. Car, s’il froissait sa femme, c’est Lionel qui en paiera le prix fort.
Les années passaient, après plusieurs tentatives échouées, Lionel obtint une bourse d’étude gratuite pour l’étranger alors qu’il venait d’obtenir sa maitrise de recherche en sciences de gestion. Cette fois était différente des années précédentes qui exigeaient qu’il payât son billet d’avion et le reste du séjour. Cette fois, tout lui était offert, le voyage, l’accueil, le séjour. Il était aux anges à l’annonce de cette nouvelle.
Mais la question qui lui trottait dans la tête, c’est : est-ce qu’il devait l’annoncer à son oncle et à sa femme. Il craignait surtout la réaction de sa tutrice. La connaissant, il savait qu’elle ne se réjouirait pas de cette nouvelle. Qu’allait-il faire ? se demandait-il.
Cette opportunité, il l’avait attendu toute sa vie. Il ne pouvait donc pas la rater. Mais, il ne voulait pas non plus que ses tuteurs le traite d’ingrat.
De retour à la maison, il vit que sa tutrice l’attendait sur le pas de la porte.
Lionel ne ferma pas l’œil de la nuit, partagé entre sa joie de départ et sa crainte de l’annoncer à ses tuteurs. Il réfléchissait à la meilleure formule à adopter.
La date du voyage approchait à grands pas et Lionel n’avait toujours pas trouvé la solution. La veille de son départ, il rédigea une lettre à leur endroit où il les remerciait de leur hospitalité et leur détailla tout. Le jour du départ, puisqu’il avait un vol de nuit, il posa la lettre sur la table à manger, ferma la porte et s’en alla, son baluchon entre les mains. Lionel resta un moment devant le portail à contempler une dernière fois cette maison qui l’avait accueilli durant des années.
Dans le taxi qui le conduisait pour l’aéroport, Lionel ne pouvait s’empêcher de penser à Emma, cette fille qu’il avait toujours secrètement aimée. Emma était une belle jeune fille métisse, d’un père européen et d’une mère ivoirienne. Ses longs cheveux sur sa belle peau métissée et son joli sourire lorsqu’ils échangeaient, allaient lui manquer. Lionel n’avait jamais fait part de ses sentiments à la jeune fille car vu son statut social, il ne pouvait pas espérer avoir une fille d’une famille si aisée à ses côtés même dans ses rêves les plus fous. Lionel préférait se contenter des petits moments d’échange qu’ils avaient lorsqu’il se rendait à son domicile donner des cours à son frère cadet, Joël.
Emma avait fait ses études en Europe et officiait comme juriste dans une entreprise internationale. Elle était entre deux avions et de ses voyages, elle rapportait toujours quelque chose à Lionel. C’est en partie grâce à elle qu’il avait un peu de nouveaux vêtements.
Il n’eut pas le temps de lui dire au-revoir car elle était en déplacement d’affaires. Le frein de la voiture tira Lionel de sa rêverie. Il descendit et se dirigea vers le quai d’embarquement…
Cela faisait maintenant un an que Lionel avait posé ses affaires du côté du Canada. Il avait réussi à se trouver un job à mi-temps. Il s’en sortait mieux il faut le dire puisqu’il n’avait pas à s’inquiéter de la scolarité. Ses études terminées, Lionel avait fait son entrée dans une nouvelle entreprise, une grosse boite qui avait des annexes implantées un peu partout dans le monde. Une veste sur mesure bleu roi, des souliers noirs, une chemise blanche, une montre, les cheveux taillés au millimètre près, une touche de son parfum son parfum frais qui enivrait toutes les assistantes au passage. Il était bel homme et il le savait, alors il jouait dessus quand il le voulait. Un petit sourire en guise de bonjour, un hochement de tête, une bise par ci, une poignée de main par-là, c’était la routine du matin de Lionel et il adore ça.
Les années difficiles qu’il avait vécu ont fait de lui, un homme généreux et altruiste, il aidait au passage et se réjouissait quand tout allait bien. Ce jour-là, Lionel avait mis un peu plus de soin dans sa toilette parce qu’il recevait le responsable juridique Afrique de l’entreprise. Que ne fut sa surprise lorsque sa secrétaire lui annonça l’arrivée de son rendez-vous.
Dès qu’elle mit le pied, aussitôt Lionel reconnu le parfum, il se retourna
Lionel resta un instant sans mot dire, puis repris ses esprits.
Une heure après un bon moment de concentration, ils avaient bouclé. Emma était ravie donc plus détendue maintenant. Lionel profita donc de la brèche qu’elle avait faite pour se présenter.
Les accolades n’en finissaient plus.
Des semaines s’étaient écoulées depuis leur dernière rencontre. Un samedi matin alors qu’il revenait du sport. Il reçut un SMS d’Emma qui disait.
Lionel sourit, prit sa douche, son petit déjeuner et attendait impatiemment 16h pour se rendre à son rendez-vous. Il imaginait toute sorte de scénario étendu dans son canapé, une revue entre les mains. La sonnerie de son téléphone le réveilla. En effet, Lionel s’était endormi. Il regarde sa montre, il était 15H30.
Il fila rapidement dans la douche, vite fais, il enfila T-shirt à col blanc, un bermuda blanc, un pull par-dessus les épaules, des tennis noires, sa montre, son bracelet, se brossa la tête, une touche de parfum, il était prêt pour aller rencontrer Emma. Il prit les clés de sa voiture sur la commode et hop, le voilà dans l’ascenseur, il était 15H45, 10minutes de trajet, le voilà au café. Il choisit une table sur la terrasse pour profiter de la vue. Pendant qu’il attendait, il prit un bouquet de fleurs chez un marchand ambulant. 16H tapante, Emma fit son entrée toujours avec sa joie contagieuse.
Il lui tendit le bouquet, tira la chaise et ils s’assirent. Le temps passait sans qu’ils ne s’en aperçoivent. Ils parlaient de tout et de rien, du passé, du travail, etc.
Au moment de se quitter, ils se promirent de se revoir. On ne pouvait compter le nombre de fois qu’ils s’étaient revus soit pour un café, soit pour une promenade…jusqu’au jour où, pendant qu’ils échangèrent, assis dans son canapé, Lionel qui l’avait toujours désiré profita pour l’embrasser, Emma lui rendit son baiser. Un baiser sur le lobe de son oreille, puis dans le cou la fit tressaillir. Lionel continuait son long et beau voyage sur le corps de la jeune dame qui s’offrait au fur et à mesure que sa langue le parcourait. De ses doigts, il fit sauté un à un, les boutons du chemisier en soie qu’elle avait mis. Sa poitrine lui laissait voir ses beaux seins ronds et pointus qu’enjolivait encore plus le soutien-gorge rouge en dentelle qu’elle arborait. Emma aimait bien la lingerie fine et Lionel était en extase devant autant de beauté. Il l’étendit tout doucement sur le canapé et l’embrassa avec fougue pendant que son corps tout naturellement l’effleurait…cela continuait jusqu’au bout de la nuit et les deux épuisés, s’endormir sur la moquette qui recouvrait le sol.
A son réveil, Lionel avait cherché Emma qu’il ne trouva pas mais à la place, un mot écrit au rouge à lèvres l’attendait.
Lionel sourit puis alla prendre un bain et se relaxer.
Comme il avait pris des congés pour passer du temps avec Emma et que maintenant ce n’était plus possible, il décida de partir pour un moment en Côte d’Ivoire pour voir son oncle et sa femme. Vu que depuis son départ, il n’avait plus aucune nouvelle d’eux.
Il prépara minutieusement ce voyage. Lorsqu’il foula le sol ivoirien, la voiture qu’il avait faite louer pour son séjour l’attendait, il fit un tour à l’hôtel où il allait loger pris une douche, se changeait et le voilà dans les supermarchés de la ville pour des emplettes, en plus de ce qu’il avait rapporté de l’Europe. Il chargea le coffre, les enveloppes prévues pour l’occasion et direction la maison de son oncle. Elle n’avait pas changé d’un pouce, seulement la peinture défraichie qui rappelait les vieux jours qu’elle avait comptés.
Il sonna et un jeune garçon vint lui ouvrit.
Il suivit l’enfant jusqu’au salon. Qui est venu ? demanda la femme à l’enfant.
Lionel fit son entrée, depuis la terrasse son parfum avait déjà enveloppé toute la pièce.
Lionel s’assit, il savait que personne ne l’avait reconnu, il sourit.
Son oncle, que le temps, la maladie et le poids de l’âge avaient vieilli et amaigri, prit maintenant la parole. Monsieur, donnez-nous les nouvelles, qu’est-ce qui vous emmène ?
Son oncle resta assis les mains sur la bouche, sans voix.
Les deux n’en revenaient juste pas. Il se leva appela les enfants de la cour et les invita à décharger sa voiture. Il y’avait de tout ; vêtements, chaussures, ustensiles, mobiliers de cuisine…
Après avoir tout déchargé, Lionel tendit les enveloppes à son oncle et à sa femme encore sous le choc et prit la parole.
Il fit lever sa tante.
Il prétexta un rendez-vous d’urgence et se leva, les deux l’accompagnèrent à sa voiture. Lorsqu’une voisine un peu indiscrète s’avança. Elle se dépêcha de lui crier :
Lionel hocha la tête et monta dans sa voiture, leur fit un au-revoir de la main et s’en alla. Il les regardait à travers le rétroviseur, remplit d’émotions et une larme vint s’écraser sur sa joue…
Fin !