Oumou Ouattara, ” Entreprendre pour une femme, c’est emprunter la voie de la liberté financière”

Ingénieure en agroalimentaire, diplômée en esthétique et propriétaire d’un institut de beauté, Ouattara Oumou Rockiatou mène tranquillement sa barque dans l’océan de l’entrepreneuriat, avec quelques courants d’air et des vagues qui tentent souvent de la déstabiliser. Mais pour la traversée, Oumou Ouattara a des secrets de navigation, notamment, des voiles taillées dans une montagne de courage, des rames faites de persévérance et une boussole alimentée par des objectifs précis, du professionnalisme et de la volonté.

Qui est Oumou Ouattara ?

Je suis Ouattara Rokiatou Oumou, avant dernière d’une formidable famille de 14 enfants. Titulaire d’un diplôme d’ingénieur en agro-alimentaire, je prépare une spécialisation en audit qualité option sécurité et environnement. Parallèlement, j’ai fait un certificat en esthétique

 

Pourquoi avez-vous décidé d’investir dans un institut de beauté puisque vous avez fait des études en agro-alimentaire ?

C’est une passion inavouée. Après mon échec au baccalauréat, j’ai voulu m’orienter dans le domaine de l’esthétique, mais je n’ai pas eu le courage d’en parler à mes parents parce qu’ils ne l’auraient pas accepté. J’en ai parlé à une amie sans plus. J’ai repris ma terminale, j’ai continué mes études, puis dès que j’en ai eu les moyens, j’ai fait des études d’esthétique et démarré mon projet de création d’un institut de beauté.

Quelles sont vos valeurs ajoutées dans ce domaine, quelle est la particularité de votre institut ?

Rire….La particularité de l’Institut Almas, c’est la passion que j’ai pour ce métier, la recherche perpétuelle de techniques nouvelles plus efficaces et le choix avec soin d’un personnel accueillant et compétent. Des personnes qui ont suivi une formation qualifiante dans le domaine de l’esthétique. Nous avons des équipements de pointe et choisissons des produits de qualité pour les soins que nous faisons. Nous nous efforçons d’être très professionnelles afin de satisfaire notre clientèle.

 

Avez-vous d’autres activités à part l’institut ?

Je suis responsable qualité dans un laboratoire de la place depuis 2012.

 

Comment arrivez-vous à gérer votre carrière professionnelle et votre vie de femme entreprenante ?

C’est compliqué. Ma journée de travail se termine à 16h30, je passe ensuite à l’institut prendre des clients et faire le bilan de la journée. Mes samedis sont consacrés à l’institut. Parfois, il y a des clients qui souhaitent que ce soit moi qui fasse leurs soins. C’est donc à la descente du boulot ou les weekends que j’arrive à satisfaire la clientèle qui en majorité, prend rendez-vous.

 

Ayant fait l’expérience de l’entreprenariat, quels conseils donnez-vous aux jeunes femmes qui sont en train de démarrer une activité ?

Tout d’abord il faut avoir une vision, une passion, beaucoup de courage et de persévérance. Je bénéficie du soutien de Dieu à qui je rends grâce. Je remercie aussi ma famille pour l’aide morale et financière mais aussi pour les conseils que je ne cesse d’avoir. J’ai puisé ma force de tout ce soutien car à un moment donné tu es essoufflée financièrement, moralement. C’est tout doucement que je suis arrivée à ce niveau. Toutes les femmes peuvent le faire. Comme le dit si bien le proverbe « goutte après goutte l’eau finit par creuser le marbre ».

Depuis combien de temps avez-vous crée votre institut ?

En juillet 2018.

 

Jusque-là, y a-t-il eu un progrès ? si oui, Selon vous quelles-en sont les raisons ?

Je constate des progrès chaque jour. C’est grâce aux réseaux sociaux, et au bouche à oreille que j’ai pu avoir mes premiers clients et des rendez-vous pour une mise en beauté.

 

Avez-vous bénéficié d’un crédit pour démarrer ou vous avez débuté avec vos propres fonds ?

Je n’ai malheureusement pas pu bénéficier d’un crédit. C’est vrai que je n’en ai pas fait la demande. J’ai préféré acquérir progressivement mes équipements et démarrer sur fonds propre.

 

Y a-t-il eu des difficultés dans les débuts ?

Des difficultés, oui, quelques-unes mais pas insurmontables. Trouver un local a été l’une des principales difficultés. Beaucoup de propriétaires ne voulaient pas que leur maison soit utilisée pour des activités commerciales et il me fallait aussi trouver l’emplacement idéal à un prix acceptable pour moi. Pour les équipements également, il fallait trouver des fournisseurs ayant un bon rapport qualité/prix, mais nous nous sommes adaptés à tout.

Mais comment vous avez surmonté ces difficultés ?

C’est la passion et la vision que j’avais qui m’ont aidé à surmonter les difficultés. J’avais un objectif, il fallait que je l’atteigne, peu importe le temps que cela prendrait.

 

Vous disiez plus haut que vous employez des personnes qualifiées, pourquoi cette initiative ?

Pour ma part lorsqu’une personne fait des études, cette personne souhaite mettre en pratique ce qu’elle a appris tout au long de sa formation. Il faut donc donner la chance aux personnes qui vont à l’école d’exercer leur métier. C’est dans ce sens, que j’ai signé un partenariat avec une école pour que les étudiantes après leur formation fassent leur stage dans mon institut. Je mets à leur disposition les conditions idéales pour leur apprentissage. Elles valident ainsi leur diplôme et peuvent se lancer dans la vie active. Je choisi les meilleures d’entre elles pour mon institut car j’ai eu le temps de les observer et de les évaluer.

 

Ici vous recevez beaucoup plus de femmes que d’hommes, comment gérez- vous les caprices de certaines femmes ?

Je souris, je fais la sourde, l’aveugle. Souvent elles te vexent mais je fais avec. C’est difficile de travailler avec les Hommes, chacun avec ces humeurs, mais c’est gérable, ça passe. Avant tout, mettre en avant le professionnalisme.

Quelle est votre relation avec les filles avec lesquelles vous travaillez ?

Ce n’est pas mon truc de jouer la patronne. Il y a des règles dans l’institut comme dans toutes les entreprises. J’établis les règles qu’il faut respecter. Si les règles sont respectées il n’y aura pas de soucis. Quand ce n’est pas le cas, la sanction tombe. Gentille, mais très sévère pour la bonne marche du travail.

A long terme, envisagez-vous abandonner le boulot au profit de l’institut ?

Je ne l’envisage pas actuellement parce que j’aime aussi mon boulot. Ce serait un choix difficile à faire. Le management de la qualité est un domaine très passionnant. Il est applicable à tous les secteurs d’activité. Je l’intègre dans la gestion et l’organisation de mon institut.

Entreprendre est un chemin de plus en plus emprunté par les jeunes femmes en côte d’ivoire, quel commentaire pouvez-vous faire à ce sujet ?

Entreprendre pour une femme, c’est emprunter la voie de la liberté financière. Il ne faut pas toujours attendre qu’une société t’emploie. Ça me fait plaisir de voir des femmes qui essaient de réussir toute seule et tentent de monter une activité. Aujourd’hui, on retrouve les femmes dans pratiquement tous les secteurs d’activités. Nous avons une grande capacité à gérer plusieurs tâches à la fois de par notre condition de mère, de femme au foyer et de femme active que nous menons de front. Donc lorsque nous décidons d’entreprendre nous avons beaucoup de chance de succès car patiente, courageuse et combative.

Si vous étiez une féline, laquelle seriez-vous ?

La lionne. Elle est courageuse et protège ses enfants.

Marina KONAN / Virginie KOSSONOU